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Combien de temps Spotify survivra-t-il ?

Ou plutôt : combien de temps les services de diffusion de musique en continu vont-ils continuer à exister ? Cela peut sembler être une question très apocalyptique, posée dans le feu de l’action, basée uniquement sur le récent dépôt de bilan de Rdio, l’un des pionniers de l’industrie. Mais la vérité est que tous les concurrents sont dans la même situation et souffrent des mêmes problèmes, à des degrés plus ou moins importants.

Spotify, le principal nom qui vient à l’esprit lorsqu’il s’agit de diffuser de la musique en continu, n’a jamais pu faire de bénéfices et survit grâce à l’argent d’investisseurs qui croient en l’avenir de l’entreprise. Avec l’extension du service à de nouveaux pays, dont la France, les recettes provenant des abonnements ont augmenté, mais la perte a également augmenté. Chaque année, Spotify saigne encore plus d’argent.

En 2011, lorsque Spotify a franchi les frontières de l’Europe et est devenu international, le service a obtenu 187,8 millions d’euros de recettes, un montant qui ne suffisait pas à couvrir les dépenses : l’année s’est clôturée en rouge, avec une perte de 45,4 millions d’euros. Il n’en a pas été autrement dans les années qui ont suivi :

  • En 2012, chiffre d’affaires de 430,3 millions d’euros, perte de 86,7 millions d’euros ;
  • En 2013, un chiffre d’affaires de 747 millions d’euros, une perte de 57,8 millions d’euros ;
  • En 2014, un chiffre d’affaires de 1,08 milliard d’euros, une perte de 165 millions d’euros.
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    Compte tenu des pertes de 2009 ( ? 18,8 millions) et 2010 ( ? 28,5 millions), Spotify a déjà accumulé des pertes de plus de 400 millions d’euros, soit près de 1,7 milliard de euros. C’est beaucoup d’argent, et tant que les investisseurs continueront à injecter des ressources dans Spotify, je me demande combien de temps ils continueront à subir les pertes successives (et combien de temps ils continueront à croire l’entreprise). Celui qui a investi dans Rdio, croyant que le service deviendrait un jour rentable, s’est heurté au mur.

    Deezer, le principal concurrent indépendant de Spotify, ne divulgue pas ses rapports financiers aussi ouvertement, mais nous savons que le service ne génère pas non plus de bénéfices, même s’il est présent dans 186 pays (Spotify n’opère que sur 58 marchés). Les Français ont réalisé un chiffre d’affaires de 93 millions d’euros au premier semestre 2015, mais ont subi une perte de 9 millions d’euros.

    Ces chiffres ont été obtenus à partir des documents préparés pour l’introduction en bourse de Deezer, qui a été mystérieusement annulée, à brève échéance, sans beaucoup d’explications ? la justification était “les conditions du marché”, ce qui est aussi éclairant que de dire que je n’écrirai plus à PerlmOl en raison des “conditions de travail”.

    Il est curieux de constater que 92 % ( !) des recettes de Deezer au premier semestre 2015 provenaient de 3,7 millions d’abonnés. Seuls 3,7 % de ce montant sont dus à la publicité auprès des non-payeurs, qui représentent une minorité dans le service de streaming musical français ? au total, Deezer affirme avoir 6 millions d’utilisateurs actifs. En d’autres termes : l’assurance gratuite fait une perte, et les publicités ne couvrent pas les pertes.

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    Les sources de revenus de Spotify sont les mêmes : 91% des revenus en 2014 proviennent des abonnements. Et les Suédois ont le problème des grands nombres avec des proportions pires : seuls 20 utilisateurs sur 75 millions paient un abonnement Spotify Premium. Comme nous l’avons vu, plus les utilisateurs sont libres, plus la perte est importante, puisque les services paient des redevances pour la diffusion de musique, que l’utilisateur soit abonné ou non.

    Même avec les dépenses élevées, les services de musique en continu ne plaisent pas aux responsables de la marchandise qu’ils vendent : les artistes. Taylor Swift, le plus célèbre des nombreux cas, a retiré toutes ses chansons de Spotify en prétendant que l’argent reçu était trop faible… Spotify paie entre 0,006 et 0,0084 € par exécution de chanson. Réduire encore plus le paiement des redevances ne me semble pas une solution viable.

    Si les coûts ne diminuent pas, les revenus doivent augmenter pour que les entreprises puissent générer un certain profit. Comment ? La seule alternative qui vient à l’esprit est de faire payer les utilisateurs gratuits. C’est pourquoi nous entendons souvent des rumeurs selon lesquelles Spotify mettra fin à la gratuité du service, bien que la société nie les plans. Seule l’entreprise elle-même admet que le forfait gratuit est important pour attirer de nouveaux payeurs : une partie des utilisateurs décident de s’y abonner après avoir réalisé l’utilité du service. Beaucoup de ceux qui lisent ce texte ne sont devenus payants qu’après avoir utilisé Spotify Free pendant un certain temps.

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    Je pense que Spotify, Deezer et Pandora seront les prochains à mourir, tandis que les options liées aux grandes entreprises comme Apple Music, Play Music et Groove survivront par le simple fait d’avoir une entreprise rentable derrière elles (les services ne génèrent peut-être même pas d’argent, mais les profits des autres produits Apple, Google et Microsoft couvrent la responsabilité et équilibrent les comptes).

    Une certitude est que tôt ou tard, chacun devra s’adapter et changer de modèle économique, car l’argent n’est pas illimité et les pertes ne seront pas subies indéfiniment (et la faillite de Rdio nous l’a montré de la pire des manières). L’autre certitude est la suivante : lorsque le modèle changera, ce ne sera pas pour le mieux.

    Faites vos jeux.

  • A propos de l'auteur

    Véronique

    La trentaine, maman de deux petits monstres de 10 ans. Je pèse chaque jour le pour et le contre dans l'utilisation des écrans pour mes bambins !
    J'écris souvent depuis les transports en commun (#teamTablette).

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